Le gamin qui parlait plutôt bien l’anglais appris dans la rue, nous a raconté son histoire. Il avait quitté 3 ans plus tôt sa famille originaire d’Agra pour, à défaut de faire fortune, pour tenter tout simplement de gagner sa vie à Delhi.
Je suis revenu en Inde l'année suivante. Il était toujours là. A mon départ, je lui ai donné 100 euros. Mauvais idée. Il s’est mis à jouer, à parier et à prendre des stupéfiants. Ses amis du quartier s’inquiétaient pour lui.
Quand je l'ai revu quelques mois plus tard, je lui a fait la morale sans grande conviction. Je le revoyais pratiquement chaque année et assistais impuissant à sa descente aux enfers. Je l’invitais régulièrement au restaurant qu’il puisse avoir un vrai repas, mais je ne lui donnais plus d’argent.
Puis en 2016, il semblait remonter la pente. Il avait trouvé un travail de manutentionnaire. Il était sorti de la drogue et commençait à mettre de l’argent de côté. Informations confirmée par l’un de ses amis chauffeur de taxi qui l’avait pris sous son aile.
Il avait pour projet de devenir chauffeur de rickshaw. Sa maitrise de l’anglais lui permettrait de travailler avec les touristes. Je lui ai redonné une centaine d’euros pour l’aider à louer un rickshaw, précisant que s’il utilisait l’argent pour jouer ou se droguer, il ne faudrait plus compter sur moi.
Cette photo a été prise l’année suivante en 2017, devant son véhicule (à droite sur la photo). Il avait tenu parole en menant son projet à terme. Il était devenu chauffeur de rickshaw. Cette année là je lui ai loué ses services pendant 3 jours. A chaque fois je lui donnais le double de la somme qu’il me demandait. Cette même année je lui ai envoyé 3 couples d’amis qui l’ont fait travailler plusieurs jours.
Lorsque je l’ai revu la dernière fois en octobre 2018, il ne louait plus de rickshaw et était devenu propriétaire d’un vélo-pousse, payé 500 euros d’occasion. Il m’a dit que le prix des carburants et la location du tuk-tuk l’obligeaient à travailler plus de 20 heures par jour. Et de peur qu’on ne lui vole son véhicule, il dormait dans son minuscule véhicule. Avec son vélo-pousse, même si le travail est plus pénible physiquement, il dégageait une meilleure marge. Il pouvait envoyer de l’argent à ses parents et à sa soeur restés à Agra, qu’il n’avait revus qu’une seule fois depuis 2008.
Je ne l’ai plus revu depuis 2018. Lorsque je suis passé brièvement à New-Delhi en octobre 2023, il n’était pas là. Je me suis inquiété pensant qu’il avait peut-être été victime du Covid ? Mais un de ses collègues m’a dit qu’il était reparti dans sa famille à Agra au moment de la pandémie, mais qu’il devait revenir travailler à New-Delhi. J’espère le revoir quand je retournerai en Inde.
Jean-Luc Drouin
tu as su donner de toi .. mais aussi pécuniairement,
un peu comme à un fils..!
(tu te fais du soucis pour lui)
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