Voici comment sont nés les fantômes qui nous torturent

encore. Nous avons séparé la couleur de son support

naturel, nous avons séparé le bruit du mouvement qui le fait

naître, et de l'objet la forme qui le contient.

Partout on a vu flotter ces figures vagues, ces reflets

égarés, ces contours sans corps.

Mais bientôt, comme des enfants revenus honteux à la

maison, tous les bruits, tous les sons, toutes les

couleurs, tous les parfums regagneront leur place.

Cette "âme", qui fut le lieu de leur séparation, deviendra

inutile et vacante quand les sabots des vrais chevaux la

piétineront, quand le bourdonnement regagnera la guèpe,

quand naîtra en nous quelque chose d'autre, un accord, une

entente, un acte perpétuel.